mercredi 23 juillet 2008

Chella, Lyautey et Céline


Le paquebot Chella de la compagnie de navigation Paquet dans un bassin du port de la Joliette. (Collection des Archives du musée d’histoire de Marseille). Paquebot en acier de 130 mètres de long, construit aux Forges et chantiers de la Méditerranée à La Seyne en 1933.

Chella et remorqueur, illustration d’Albert Sebille (1874-1953), peintre de la marine en 1906.

Curieux paquebot que ce Chella qui croisa à deux reprises (au moins) le chemin de célébrités.
Dans l’entre-deux-guerres, la Compagnie Paquet exploitait une ligne de Marseille à Dakar avec escales à Tanger et Casablanca avec les paquebots Maréchal-Lyautey, Médie II, Chella, Koutoubia et Iréméthie II.
En 1935, pour ramener, selon ses derniers souhaits, les cendres du maréchal Lyautey au Maroc, on embarqua son cercueil sur le croiseur Dupleix, escorté de deux contre-torpilleurs. Une équipe de ses derniers officiers, Keller, du Souzy, Durosoy, Pélier, Boisboissel, l’accompagnait pendant que sa famille autour de la maréchale, ses autres collaborateurs et amis et des personnalités de haut rang remplirent le paquebot Chella de la Compagnie Paquet, spécialement affrêté pour l’occasion. (source : Henry de Boisboissel)

Céline et Chella


Après la déclaration de guerre de 1939, Louis-Ferdinand Céline «va vivre un épisode bouffon, très célinien. En septembre, il devient médecin maritime pour la compagnie Paquet. Il embarque donc sur le Chella, qui assure la ligne vers le Maroc. Mais dans la nuit du 5 au 6 janvier 1940 devant Gibraltar, le navire éperonne par mégarde un aviso britannique. Il y a vingt-sept morts du côté anglais et le docteur Destouches (vrai nom de Céline) soigne les victimes. Le Chella rallie tant bien que mal Marseille.» (François Gibautlt, dans Lire hors-série n°7).
Céline est en fait volontaire mais trop vieux pour aller au front et invalide à 75% depuis la Première Guerre mondiale après des faits d’arme qui lui valurent des médailles et la quatrième de couverture en couleur de L’Illustré national. Il devient donc médecin de bord sur le Chella, réquisitionné pour des transports d’armes : «Militaire comme tu me connais, tu ne seras pas surpris de me voir devenu médecin de la marine de guerre et embarqué à bord d’un paquebot armé » écrit-il à un de ses amis, le docteur Camus.
Il écrit aussi à René Arnold : «Gibraltar 11 janvier [1940] À peine venais-je de vous écrire que nous faisions naufrage devant ce port. Heureusement (si l’on peut dire) sauf, mais ayant expédié au fond 24 vaillants anglais. Collision de détroit ! avec explosion - et blessés partout. Quelle nuit ! Quelle longue nuit ! Nous rejoindrons Marseille plus tard et puis je rechercherai un embarquement. Comme la vie est aléatoire!». Enfin il précise, toujours professionnel : «Les médicaments font merveille! après cette nuit dans l’eau que de bronchites guéries, prévenues!»

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